Antigone - King's Theatre - Edinburgh - 16/08/2015

On sait que Juliette Binoche est parfaitement à l'aise avec la langue anglaise depuis The English Patient ou Le Chocolat.  L'an passé, elle composait également dans cette langue avec Kristen Stewart. Dans Sils Maria, elle jouait une célèbre actrice de théâtre préparant un des rôles de sa vie. Quand le réputé Ivo Van Hove a voulu qu'elle retourne sur les planches, pour de vrai, Juliette Binoche a insisté pour que ce soit Antigone, la pièce de Sophocle. Le support était disponible. La Canadienne Anne Carson avait publié sa traduction anglaise de l’œuvre en 2012. Il ne restait plus qu'à transposer Antigone dans une mise en scène contemporaine.


Du plus haut des balcons au quatrième rang, la vue est excellente vers la scène. Les acteurs sont équipés de micros donc la compréhensions des textes ne pose aucun problème. La scène est assez épurée. Un astre solaire occupe le fond de scène, entrouvert, diffusant quelques rayons. Des projections sont visibles sur ce mur également. A part la vidéo de fin de spectacle sur laquelle nous reviendrons, l'imagination manque quelque peu et on peut penser que Van Hove a pioché dans Google Images. Au sol, au centre de la scène, se dessine une trappe, pour symboliser la tombe de Polynice, frère d'Antigone. L'histoire est respectée à la lettre. Créon, roi de Thèbes, refuse d'accorder les rites funéraires à celui qu'il considère comme un traître. Antigone est la sœur de Polynice et désire qu'il ait le digne enterrement qu'il mérite. La spécificité de cette adaptation réside dans la chronologie de la narration. Dans la tradition du choros grec, les événements sont racontés par des acteurs avant que d'autres personnages les interprètent. On comprend que l'interdiction a été violée avant de voir Antigone pratiquer les rites à grand renfort d'encens et de bouquets de buis. Sur cette scène sans parole, la mise en scène fonctionne à merveille. La lumière entoure Juliette Binoche au dessus du corps tuméfié de Polynice. Puis, celui-ci disparaît. Seule la terre reste sur scène. Antigone est une tragédie. Le personnage du garde (Obi Abili) se permet un peu d'humour et arrache des rires aux spectateurs mais sinon le propos est grave. Au premier plan, des canapés de cuir ont été disposés près de meubles aux contours austères. Créon porte le costume tel un magnat de la City. Thèbes est en crise. Omnipotent, il n'écoute pas les conseils. Il ne veut pas épargner Antigone. Patrick O'Kane joue remarquablement bien. Il apparaît comme possédé par l'intransigeance du pouvoir. A propos de Juliette Binoche, l'impression est différente. Elle crie ses répliques la plupart du temps. La presse l'a taxé d'hysterique après les premières représentations au Luxembourg, à Londres, Paris, en Belgique, Allemagne, Pays Bas. Pour sa défense, disons que cette projection de voix requiert une certaine technique. Ce n'est que dans la mort qu'elle trouve l'apaisement et une diction très juste et posée.  Et c'est à Créon de devenir fou. On apprend la mort de son fils avant de voir la scène. Créon a tout perdu. Son fils, sa femme. Le prix à payer pour le totalitarisme. Le rayon de soleil se referme en fond de scène. Et l'on voit Antigone sous un drap mortuaire, allongée sur un brancard d'hôpital tout à fait contemporain. Créon contemple.

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