Leviathan

Le palmarès du Festival de Cannes 2014 est décidément pertinent. La palme d'or fut attribuée au chef d’œuvre Winter Sleep. Le jury, présidé par Jane Campion et regroupant de grands cerveaux du cinéma mondial (Sofia Coppola, Nicolas Winding Refn, William Dafoe, Carole Bouquet....) a aussi honoré du meilleur scénario le film russe Leviathan. C'est rare de reconnaître une telle cohérence dans les choix. Les deux long-métrages nous font voyager vers des paysages peu habitués aux caméras. L'univers est masculin mais le personnage féminin est le cœur, l'élément perturbateur. Si les principaux protagonistes de Winter Sleep mènent une vie plutôt bourgeoise, le climat social est tout autre pour les personnages principaux de Leviathan. Sur les rives de la Mer des Barents, la vie n'a pas gâté Lylia. On découvre rapidement que cet adolescent n'est pas son fils et qu'il n'est pas tendre avec elle. On comprend qu'elle supporte mal le patriarcat de Nikolai. Elle aime se sentir belle mais ne s'en donne pas les moyens. Elle aimerait qu'on la trouve belle, qu'on puisse la désirer et cette envie va mener le film vers le meilleur ou le pire. Il est donc possible de construire un scénario où les contours de l'histoire se dessinent sans heurt et sans ficelles. On apprend tardivement qu'elle travaille dans une conserverie de poissons. Le parcours de l'héroïne n'emprunte pas ce trajet routinier par hasard à un certain moment de l'histoire. Les personnages masculins sont taillés à la serpe. Nikolai a de faux airs de Paul Newman, d'André Dussolier et d'Alex Lutz qui passeraient des années à boire de la vodka et tirer à la carabine. D'après le générique de début du film, le film a eu le soutien du Ministère de la Culture russe. Pourtant, il nous présente une image assez désastreuse de la société russe : alcoolisme donc, armes à feux mais aussi administration kafkaïenne (quelles scènes de verdict au tribunal !) corruption au plus haut degré. Le visage juvénile de Vladimir Poutine trône dans le bureau de cet élu local qui souhaite exproprier Nikolaï. L'acteur Roman Madyanov incarne un des personnages les plus "evil" du cinéma ces dernières années. Mais, à la vue de la dernière scène du film, on comprend que ce n'est peut-être pas lui le plus sombre... Au delà de la critique politique, Leviathan est aussi une œuvre à charge contre la religion. Léviathan n'est-il pas, dans la Bible, un monstre marin. Les paysages de bateaux échoués et de squelettes de baleines hantent l'esprit. 


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