Pierre Boulez - Philarmonie de Paris

Ce samedi après midi, il valait mieux suivre le chemin familier vers la Cité de la Musique plutôt qu'entrer dans le nouveau monument à l'architecture reptilienne de la Philarmonie. Sa construction fut interminable et n'est d'ailleurs pas achevée. Dans ce hall peu accueillant aux murs de béton et au plafond hostile pour les pigeons, la file d'attente est longue pour découvrir l'exposition David Bowie is. Comme pressenti il y a presque deux ans, l'organisation ne semble pas aussi idéale que l'installation originelle à Londres (ici). Privilégions donc l'autre exposition d'envergure du musée, celle consacrée à Pierre Boulez. Pour fêter son quatre-vingt-dixième anniversaire, une rétrospective y est organisée de mars à juin 2015. 


Le compositeur français a été influencé par de grands noms de la culture du XIXe et XXe siècle. Il est ainsi rappelé l'aura qu'ont pu avoir Paul Klee ou encore Mallarmé sur son œuvre. Cette exposition crée donc des liens très intéressants entre la musique contemporaine de Boulez et la peinture, la poésie, l'architecture (on retrouve des esquisses de Gehry dans un style découvert à la Fondation Louis Vuitton). Le port de l'audioguide est très intéressant pour écouter des extraits d'interviews où il explique son processus torturé de création. Pour lui, l'orientation musicale qu'il a choisie était une continuité de l'histoire, cohérente avec ses contemporains de l'art. Pourtant, les œuvres de Boulez ne sont que ruptures. Il insiste sur l'intensité, l'attaque des notes. On essaie de se raccrocher à un vocabulaire musical universel car sinon la lecture de ses partitions impose une thèse de physique-chimie minimum. Si le cerveau du visiteur commence à chauffer, il peut se poser dans les salons à ambiance éclairés comme des strip clubs mais où on diffuse plutôt La Deuxième Sonate, Le Marteau Sans Maître, Pli Selon Pli ou Incises. Blague à part, ces lieux d'écoute sont une excellente idée. La muséographie est vraiment réussie. Pierre Boulez dirigea aussi les orchestres les plus réputés du monde. On le découvre guidant ses musiciens sur Beethoven, Debussy, Berg et ses propres compositions. Mais la vidéo la plus passionnante est celle d'une master class donnée en 1988 extraite du documentaire Naissance d'un geste (plus d'informations et un court extrait ici). On le voit donner des conseils avec sourire mais autorité. Le plus impressionnant est sûrement cette relation presque télépathique qu'il crée avec ses musiciens qui sont en harmonie totale avec ses partitions chaotiques. Pierre Boulez fut aussi un vrai empêcheur de tourner en rond. Longtemps fâché avec la politique culturelle française et exerçant à l'étranger comme en témoigne de nombreuses coupures de presse, il accepta finalement la proposition de Pompidou de diriger l'IRCAM (Institut de Recherche et de Coordination Acoustique/Musique) à partir de 1977. Les ordinateurs rejoignent son orchestre à propos duquel il réfléchit constamment à la meilleure disposition possible pour mettre en valeur sa musique (Repons'). On ne va pas se mentir. Les disques de Pierre Boulez ne furent jamais sur nos étagères. Mais quand on s'attarde sur son travail avec Frank Zappa (The Perfect Stranger) ou encore l'obscur d'un triptyque de Francis Bacon, on se dit que les connexions sont évidentes, forment un réseau certes cérébral mais bien stimulant.

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