Brave New World - Dox - Prague

Tout près de la gare d'Holešovice, une ancienne usine a été rachetée en 2002 par Leoš Válka et un petit groupe d'investisseurs. Ils voulaient créer à Prague un centre d'art contemporain digne de ce nom. L'initiative fut critiquée comme en témoigne le tag réalisé sur la façade dès son ouverture en 2008 mais que le propriétaire n'a pas effacé. Il a même cerné son bâtiment d’œuvres de David Černý dont ce drapeau tchèque dont les couleurs bougent en fonction du vent comme pour rappeler l'histoire chaotique de son pays. 


Du 11 septembre dernier au 11 janvier 2016, le centre se met à l'heure de la dystopie. Sous la direction de Leoš Válka, des artistes présentent leur interprétation de trois célèbres romans : 1984 d'Orwell, Fahrenheit 451 de Bradbury et Brave New World d'Huxley. Au fil de l'exposition sont écrites des citations de ces trois livres correspondant aux œuvres présentées. Tout d'abord, c'est la dimension totalitaire qui est mis en avant avec la surveillance de la population et l'enfermement. Tout commence avec des plans de tristement fameux Panopticon de Jeremy Bentham, cette prison "modèle" imaginée à la fin du XVIIIe siècle. Elle permettait d'enfermer davantage de prisonniers et de faciliter leur surveillance. A côté, on retrouve des photographies d'un établissement construit sur ce modèle à Cuba dans les années 1920 par le dictateur Machado et où vécurent les frères Castro. Les clichés furent réalisés par Jason Florio. Le photographe allemand Burkard présente aussi les camps de "rééducation" qui existaient encore en Sibérie en 1990. "You had to live in the assumption that every sound you made was overheard and every movement scrutinized" George Orwell.


Fasciné par ses clichés, le visiteur contourne le haut mur où ils sont accrochés et se retrouvent face... à d'immenses statues de Staline, Hitler, Lénine et Mao. Flippant de les voir nous dominer et flippant également d'entendre des personnes (françaises en l’occurrence) qui hésitent sur leurs identités. Elles ont été réalisées par Zarko Baseski sous le nom d'Ordinary Man. En face d'eux, est récapitulé sur un mur le bilan humain des démocides de l'histoire contemporaine. Un buste d'homme les regarde avec peur.


Barbora Bálková représente également ces dictateurs du XXe siècle mais bien moins à leur avantage. From Nowhere to Nowhere les fait tourner en bourrique, à moitié nu, comme soumis au regard des visiteurs. Le tout surmonté d'une citation de Baudrillard.


Le thème de la surveillance est repris selon un sujet plus actuel, les caméras et les réseaux sociaux. Paolo Cirio et Allessandro Ludovico présentent un projet réalisé en 2011 appelé Face to Facebook - Hacking Monopolism. Ils se sont appropriés 1 million de profils pour les passer dans un logiciel de reconnaissance faciale. Puis, 250 000 d'entre eux ont servi à créer des couples mis en ligne sur un espèce de site de rencontre. Lovely-Faces.com renvoie désormais à ce site .


 La carte de l'Empire Nestlé avec l'ensemble de ses filiales à travers le monde juste derrière un caddie doré n'interpelle pas trop. Finalement, ce n'est pas dans ce musée que l'on trouve la meilleure réalisation sur le thème de la surveillance. Au dernier étage de la Galerie Nationale, sont rassemblées des œuvres d'étudiants européens diplômés d'art, Startpoint. 20 artistes ont été sélectionnés de 34 écoles de 18 pays différents. On retient Esther Hovers. Elle a réfléchi aux attitudes qui peuvent être jugées suspectes par les caméras et en a tiré toute une étude tout à fait artistique.


L'installation ci-dessous n'est pas inédite sur Band Meeting car déjà vue à la Gare Saint Sauveur de Lille en 2012 (ici).


Par contre, celle de Jens Hikel et Leoš Válka (Absolute Happiness) est non seulement inédite mais est pensée pour Dox et ses trois étages. Elle répond au livre d'Aldous Huxley qui donne son nom à l'exposition : "Millions of identical twins. The principle of mass destruction at last applied to biology".

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