The Curious Incident of the Dog in the Night-Time - Gielgud Theatre - London - 21/12/2016

En plein West End, le Gielgud Theatre accueille cette pièce depuis juillet 2014, qui est à l’affiche à Londres depuis août 2012. Les étoiles sont alignées pour cette histoire qui a fait du livre de Mark Haddon, un best-seller international. The Curious Incident of the Dog in the Night-Time est l’histoire de Christopher, adolescent souffrant de troubles autistiques. Il vit avec son père dans un quartier résidentiel de Swindon (dans le sud ouest de l’Angleterre). L’histoire commence quand il retrouve Wellington, le chien de sa voisine, mort, le corps transpercé par une fourche. La pièce part de cette situation. Une musique électronique assourdissante et des lumières épileptiques accompagnent les hurlements de Mme Shears. Christopher est prostré près du cadavre du chien.Très vite, un policier arrive et les réflexes protecteurs que l'adolescent s’est construit apparaissent. Le père entre également en scène. On retrouve le personnage working class, qu’on imaginait peut-être un peu plus jeune dans l’histoire. Les acteurs évoluent sur un sol qui comme les trois hauts murs sont trois grands tableaux à craie. Christopher dessine son premier smiley, simple représentation de ses émotions. Nous nous estimons chanceux au premier balcon de voir parfaitement le sol. Pour que tout le monde soit heureux, les traits sont reproduits en même temps sur les trois autres cloisons. Ce décor offre au fil de la pièce des tonnes de possibilités. 


Des trappes s’ouvrent au sol et à hauteur d’homme sur les côtés. Des leds s’illuminent et pavent le sol pour délimiter par exemple les différentes maisons du quartier. En effet, Christopher doit mener l’investigation. Qui a tué Wellington ? Il mène donc une enquête de voisinage. Son environnement est limité à sa maison, ses voisins donc et son école. C’est ce qu’il arrive à gérer tant bien que mal en s’imposant des codes réconfortants. Il bouscule déjà ses limites en s’adressant à des «étrangers ». Les autres acteurs ne quittent jamais vraiment la scène, s’installant sur des bancs lumineux tout autour de l’action. Ils bougent en slow motion ou au contraire en accéléré en fonction du cycle des émotions dans le cerveau de Christopher. On peut parler de véritable chorégraphie avec des corps relâchés ou tendus, des portées. Le jeune acteur choisi pour le rôle principal est très complet. On comprend la complexité du personnage, à la fois très vif mais se heurtant à des limites comportementales. Il est aussi très attachant. Les blagues sont distillées pour rythmer un spectacle qui emporte le jeune public : « sa maman est vraiment morte ? » (et les "ooooooo" quand le père offre un puppy trop mignon à Christopher). Sans dévoiler toute l’histoire, ses questions vont remettre en cause ce que son père lui a dit depuis qu’ils vivent tous les deux. Les rebondissements sont aussi racontés par son professeur qui lit le récit que Christopher écrit au fur et à mesure. La pièce est ainsi parfaitement fidèle au roman. « Tu sais, un jour, on pourra l’adapter au théâtre », dit-elle, complice avec le public. Pendant qu’il a toujours ce regard rêveur de celui qui pourrait regarder le ciel pendant des heures, en s’imaginant astronaute. A la fin de la première partie, Christopher décide d’aller à Londres. Après l’entracte, il embarque donc son rat de compagnie (superbe moment plus tôt dans le spectacle où il est en lévitation avec lui) et c’est parti pour l’aventure. Ce n’est pas compliqué de se rendre dans la capitale depuis Swindon. C’est ce que semble dire tous ceux qui croisent son chemin. Mais Christopher est autiste. C’est à ce moment que la mise en scène est la plus spectaculaire. Son esprit va à 2000 à l’heure et l’inconnu est terriblement effrayant. La musique et les lumières deviennent très chaotiques, les déplacements sont très rapides pour toute la troupe autour de lui, les projections inondent la scène. Nous voilà dans un train puis le décor s’ouvre pour laisser apparaître une rame de métro. Il prend un escalator comme par magie sur le mur du fond. La performance devient toujours plus physique et le metteur en scène a les moyens de ses ambitions. Ce n’est pas une débauche d’effets spéciaux non plus car quand le propos devient plus intimiste, on revient à plus de simplicité. Dans le final, son horizon est l’examen de mathématiques A Level. En effet, il adore les maths comme inscrit sur son t-shirt. Le spectacle crée un peu l’événement autour de cela. Certains spectateurs sont assis sur des « prime number seats ». « Win a prize if your name is a prime number », explications à l’appui. Après le salut, Christopher revient pour résoudre son exercice de mathématiques avec le public. Pour cela, il utilise à plein toutes les capacités technologiques de la scène. C’est une occasion de célébrer la qualité d’innovation de la réalisation. Le tout se termine dans une explosion de confettis. The Curious Incident of the Dog in the Night-Time est un spectacle grand public dont l’histoire séduit tout autant les adultes et les enfants. Il n’est pas tiède pour autant. Pas du tout. Ultra dynamique et remarquablement interprété, ce spectacle est une réussite. Et on en repart gonflé à bloc. On aimerait revoir ce personnage au cours de ces études supérieures. « You mean I can do it ?». C’est un spectacle sur la différence, l’acceptation de celle-ci et l’accomplissement. Un grand moment.

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