Trust - La Luciole - Alençon - 10/12/2016
Il n'y a plus une place pour se garer dans le brouillard de décembre. Le concert de Trust est complet depuis un bail mais surtout Kendji Girac joue dans la grande salle voisine de l'Anova. La Luciole c'est plus à gauche en sortant du parking. Bernie Bonvoisin et Norbert Krief se sont réconciliés. Embrouillés pour des histoires de thunes depuis leur dernier album en 2008, ils célèbrent cette année le 40e anniversaire de Trust. Mais le groupe ne passe pas son temps à regarder dans le rétroviseur. Il se projette surtout vers 2017, année présidentielle. Les textes de Bernie sont terriblement (et tristement) toujours d'actualité. Un nouvel album est même envisagé où figurera peut-être L'Archange qui ouvre le set. "Genou à terre" répète Bernie, visiblement inspiré par le fondamentalisme d'aujourd'hui comme il l'était en 1979. Le son est absolument parfait comme toujours à la Luciole. Placé plutôt centre-gauche face à la scène, l'ampli de Nono semble branché directement dans notre cerveau et les paroles de Bernie, très présent dans le mix, parfaitement compréhensibles. Pour ce retour, le groupe est aussi constitué d'Iso Diop à la seconde guitare, avec eux depuis 2006. David Jacob est à la basse et était du come-back de 1996 déjà. Son jeu au doigt arrondit l'ensemble et quand il prend son médiator sur l'intro de On lèche, On lâche, On lynche ou Le Mitard, il a un son à déterrer l'ennemi public numéro un. Christian Dupuy est à la batterie, 21 ans, Marseille. "Quoi bouh Marseille ?! Moi j'aime bien Marseille, c'est une belle ville". Ah oui parce que Bernie parle. Il annonce une soirée détente. C'est vrai que l'ambiance semble vraiment excellente et le plaisir est là. On peut vraiment s'éclater à 60 ans. Bernie plaisante mais est bien bien en place. On retrouve son timbre unique sur le faux rythme de Au Nom de la Race, le définitif Instinct de Mort. Il se balade sur Marche ou Crève, s'arrache les cordes juste quand il faut. Comme un Damné signe aussi un retour parfait dans la setlist de Trust. Police Milice est envoyé sobrement. Nono lance le riff plusieurs fois et Bernie se colle au micro, visage caché par ses bras, son bob et ses lunettes. Des lumières bleu-blanc-rouge tapissent le fond de scène. Bernie change un poil le phrasé des couplets (comme sur Le Temps Efface Tout, excellent titre du très bon Europe et Haines) et la foule clame le refrain. Poussé par Bernie depuis le début, le public commence à spontanément se lever des gradins. "Vous n'avez pas de canapé chez vous ? Vous restez debout chez vous et vous êtes contents de vous asseoir en concert ? Sinon, nous, si vous bougez pas, on peut jouer assis." Comme répète Nono, Bernie est taquin. Mais il sort de ses gonds avant de jouer le nouveau morceau F Haine (épelé par Nono pour que tout le monde comprenne bien). L'ambiance est un peu bizarre pendant cette diatribe. Il développe autour du refrain "La haine est une blonde qui surfe sur la vague marine ... c'est la France éternelle qu'on assassine" (gestes à l'appui). Le public finit par reprendre ce refrain avec force mais une réaction ou deux font dire à Bernie qu'il y a sûrement des électeurs du FN dans le public. Trust a choisi de jouer dans des villes moyennes situées au cœur d'un bassin rural. Et c'est le grand public qui vient voir Trust.. Pour lutter contre le FN, les artistes sont plutôt discrets. Certes, Lofofora et autres groupes d'esprit punk sont sur le terrain. Certes, Florent Marchet vient de publier un disque intelligent sur le sujet avec Frère Animal. Mais dans ce cas précis, c'est un public urbain à tendance bourgeoise qui est touché. Pas vraiment la cible. Trust balance son discours à ceux qui peuvent sombrer. "Il y a des mecs qui votent FN dans la salle ? Ok pas de problème. Je vous parle. Ces mecs-là valent pas une thune, ces mecs-là valent pas une thune". On sent la colère de Bernie. F Haine, la compo, n'est ni moderne ni particulièrement énervée mais elle existe. L'ambiance change littéralement quelques minutes après quand on fête l'anniversaire d'"Isotronic" et celui de Nathalie "jeune femme" (selon Nono) du premier rang que le groupe fait monter sur scène avant le bluesy et réussi Tout est à tuer. L'enchaînement des titres On lèche, On lâche, On lynche, L'Elite, Le Mitard, Préfabriqués achève de nous convaincre que le retour de Trust est indispensable. On a même droit à Certitude Solitude pas vraiment répété. "On va faire sans filet". Nono (regardant la setlist que lui montre Bernie) : "Ah oui on l'a pas trop bossé celle-ci". C'est vrai qu'on a un peu l'impression d'être dans la salle de répétition mais les musiciens sont hilares. Surveille ton look, revisité, déboule en premier titre de rappel. Enfin, Nono joue les notes que tout le monde attend, avec ce sourire qui ne l'a pas quitté du concert. Bernie pousse toujours plus les "Oh Oh". Disons le clairement. Dj Jean Mi à la fête du comité d'entreprises de Concarneau très bien, Anthrax bien, Le Bal des Enragés pas toujours. Mais la version ultime est jouée par Trust. C'est leur morceau. Donc, n'oubliez pas les paroles. Il va falloir chanter fort le 9 mars au Mans et au Hellfest en juin !
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