Massive Attack - Zénith - Nantes - 13/02/2019
Massive Attack célèbre donc sur scène les 20 ans de l'album Mezzanine, publié le 20 avril 1998. Le groupe a parcouru l'Europe au cours de l'été 2018 et seule une petite poignée de titres de cet album fut alors interprétée au cœur d'une setlist couvrant la carrière du groupe, comme aux Vielles Charrues ou encore aux Nuits de Fourvière. Il était donc annoncé que Massive Attack interprète cet hiver l'intégralité de Mezzanine. Nous avons aussi découvert, dès la première date de cette tournée à Glasgow, que le groupe a décidé d'interpréter plusieurs reprises et, surtout, que Elisabeth Fraser et Horace Andy, les voix du disque, seront bien présentes.
Par contre, le large public ne s'attendait pas forcément à ce qu'il n'y ait pas de première partie. Et que le groupe ne joue "qu'une heure et demi" sans rappel et au revoir. L'audience est formatée par des codes du spectacle vivant ? De toute façon, Massive Attack n'est pas du genre à les respecter non ? Les spectateurs s'attendaient aussi à s'en prendre plein les yeux. La scène est cernée d'écrans. Mais, à nouveau, la démarche est radicale. L'art contemporain du groupe repose sur une sélection d'images détournées de leur contexte : mariage princier, usines chinoises d'assemblage de jouets, clichés de la pop culture et de la politique spectacle et images de guerre.
On se retrouve confrontés à des images violentes des conflits du Moyen-Orient. En 2003, Rob Del Naja avait manifesté contre la décision de Tony Blair, premier ministre britannique, de suivre son allié américain dans la guerre en Irak. Des cadavres en prime time à un concert de rock entre des salves de lumières épileptiques. On craint, dans un premier temps, à un diaporama de vidéos aléatoires, avant de se laisser entraîner par le concept finalement plus subtil que le récent film Vice, retraçant le parcours politique de Dick "Satan" Cheney, grand responsable de tout ce que montre Massive Attack ce soir. La trame narrative suit des "panneaux" écrits en français nous incitant à reprendre le contrôle.
Les reprises choisies par les musiciens varient les plaisirs, de la légèreté de The Velvet Underground et The Cure aux sons plus bruts de Bauhaus (Bela Lugosi's Dead joué par le Dead Cross de Mike Patton au Hellfest 2018) et Ultravox : Rockwrok est envoyé de façon très directe sur des images rappelant la collusion probable entre Trump et les Russes. D'ailleurs, pourquoi le public hue-t-il quand Trump apparaît à l'écran et pas quand c'est Poutine ? On ne peut nier que principal (seul?) intérêt de la soirée est la restitution live de tous les morceaux de Mezzanine. Le son est fort mais tout à fait clair et équilibré, depuis la fosse, avec les protections auditives adéquates. On réalise que Massive Attack est un groupe de rock au son de guitare hyper affirmé. Les deux batteurs se complètent parfaitement aussi. Et quand le bassiste change de matériel, on entend parfaitement la différence. Un vrai plaisir sonore sur les montées en puissance d'Inertia Creeps par exemple. La musique de Tool n'est pas très loin. Nous nous attendons pas à ce que 3D fasse des vocalises. Il assure très bien ces parties de chant, au delà du travail abattu aux machines. Au contraire, nous regrettons peut-être la grande discrétion de Daddy G.
Elisabeth Fraser a certes une belle voix cristalline et les téléphones se déplient sur Teardrop. Horace Andy est, lui, parfait, la voix calme déposée sur le canevas intense des musiciens. Peut-on rêver mieux à un concert qu'un titre comme Angel ? Terminons par les excellentes visuels qui accompagnent Dissolved Girl. Le groupe a choisi des extraits de covers du morceau qui pullulent sur YouTube dont le "FaceCam" d'une jeune femme bougeant les lèvres sur le titre. Un des excellents moments au milieu d'un set qui n'en a pas manqués.
Texte et Photos : Cyrille Blanchard
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