Entre les Murs

En effet, j'arrive après la bataille (de cour de récré). Il faut dire que le livre m'avait particulièrement déplu. L'image de l'enseignant était catastrophique : insultant, débordé, faisant preuve d'une répartie limitée (ne calculant pas certaines véritables interrogations des élèves). J'avais plus ou moins boycotté le film. Je le verrai sur Canal, au pire... C'est fait.

Et il est vraiment vraiment mieux que le livre. Bégaudeau est meilleur acteur qu'auteur. Et Laurent Cantet a su capter des sentiments, des faits qui sonnaient plutôt faux dans le roman. Certes, l'image est encore un peu caricaturale : le prof de techno qui pète les plombs en salle des profs, le dawa de l'entrée de classe, le chef d'établissement qui manque d'autorité face aux délégués en conseil de classe, le cours dialogué du prof de français qui se laisse mené par les élèves.. Par contre, la pré rentrée. On s'y croirait "Tu as ton mercredi. C'est ce que tu avais demandé". Intéressant également, le personnage du prof d'histoire-géo qui après avoir trimé en Seine Saint Denis, passe enfin le périph'. Il se rend vite compte qu'il y a un paquet de dysfonctionnements et sûrement habitué à prendre des responsabilités, essaie de faire bouger les choses. Le plus marquant reste le conseil de discipline. Une procédure respectée à la lettre, des formulations qui se heurtent à la barrière de la langue, des cas de conscience mais qui, au final ne changent pas le verdict. Par contre, la scène qui suit montrant la classe comme apaisée dans la foulée n'était pas nécessaire (encore un raccourci). Celle du tournoi de foot suffisait et on se pose toujours la même question : pourquoi des jeunes respectent le règles sur un terrain de sport et pas entre les murs d'une classe ? Par instants, on peut retrouver à la fois l'impact de la société au sein de l'établissement (sans papiers) ou le constat terrible de l'échec scolaire. Sur de nombreuses scènes de classe, on aperçoit une des élèves qui ne semble pas comprendre, ce qu'elle n'avouera qu'en fin d'année. Pourtant, elle "passe" en 3e mais ne "veut pas aller en pro". Des dilemmes d'orientation qui stigmatisent des failles du système. Les vrais stars du film sont les élèves. On est dans le vrai. Bien les échanges soient franchement excessifs, ils n'ont pas du pousser beaucoup le travail de composition pour endosser le rôle. Et cela nous donne des perles de langage urbain.