Eels - Le Cargö - Caen - 12/04/2013

La salle des musiques actuelles du Cargö est idéalement située. Tout près du périphérique, quelques pas vous mènent à l'hyper centre, aux espaces culturels du château ducal et au proche port de plaisance. Cette ambiance marine est plutôt agréable avant et après un concert surtout quand ce sont les Eels qui sont en ville. Le groupe américain remplit en ce moment les plus belles salles d'Europe. Avant ce concert normand, ils avaient joué trois soirs au Paradisio d'Amsterdam, deux au Cirque Royal de Bruxelles et vont bientôt investir le Trianon parisien pour deux soirs comme les Deftones en février. Les billets de tous ces concerts se sont arrachés. Et ce soir, à Caen, la densité est aussi forte dans cette salle dont la configuration gradins-fosse rappelle beaucoup le Stereolux de l’île de Nantes. 


A l'ouverture des portes, une longue file se dessinait mais certains occupant le bar adjacent, il reste un peu de place pour que s'avance depuis le public un grand clown triste à la couronne de travers portant lanterne et valise. Il se hisse avec l'aide du public sur scène. Il a recours à un spectateur du premier rang pour lui montrer le micro. C'est en fait le premier artiste du soir Puddles Pity Party qui vient de commencer son set sous forme de mime. Puis, une bande instrumentale de folk hantée inonde la salle depuis la sono et le clown se met à chanter avec une chaude voix puissante. Les expressions sont surprenantes mais la voix décolle littéralement. Suit une interprétation du I Started a Joke des Bee Gees. Une femme avec un masque de singe le rejoint sur scène pour se mouvoir comme un primate et lancer des bananes dans le public. La version de la reprise suivante est toute aussi personnelle : My Heart Will Go On, la B.O. de Titanic. Elle se termine en version hard rock avec du shred à la guitare. La voix se durcit reprenant quelques lignes du Enter Sandman de Metallica avant de conclure sur la partie heavy de leur One. Le show se termine sur le Lonely Guy de Dexter Romweber aux faux airs de David Bowie avant qu'il ne quitte la scène comme il l'avait rejoint. On peut lire ceci sur son site internet : "It was an impressive vocal performance in a mini-concert that David Lynch would envy". Pas faux. Du coup, quand Nicole Atkins, folk rockeuse du New Jersey, est dans la foulée seule sur scène, cela sonne beaucoup plus convenu. Et surtout, certaines personnes du public se sentent obligées de parler fort à leur interlocuteurs pour se faire comprendre... Heureusement, ce ne fut pas le cas pour le concert des Eels que les fans de toutes générations et différentes nationalités attendent avec impatience. La foule est compacte. Ce n'est pas rien de recevoir Mark Oliver Everett et ses musiciens. On ne peut que conseiller très fortement la lecture de sa bio publiée en 2008 : Things The Grandchildren Should Know. Le musicien a connu les grosses galères et petits boulots du début. Puis, le succès est arrivé d'un coup au cœur des 90's avec Novocaine For The Soul et en même temps les catastrophes. Il y raconte avec sincérité la mort de ses parents, de sa sœur, ces ruptures régulières et la difficulté d'exister dans le music business quand on est un artiste qui cherche à redéfinir sa formule musicale d'album en album sans participer au barnum de la promo. E. comme on le surnomme est aussi très drôle. C'est donc plus qu'un concert auquel nous allons assister.


Mark Oliver Everett arrive sur scène, à droite face au public, casquette vissée, lunettes teintées, barbe de plusieurs jours et ensemble de survet' Adidas noir à bandes blanches. C'est le même dress code pour ses musiciens. Le batteur est de profil sur le devant gauche de la scène et deux autres guitaristes et un bassiste entre eux complètent le tableau au deuxième plan. Comme lors du deuxième soir au Paradisio, le groupe ouvre le set avec Prizefighter de l'album Hombre Lobo, publié en 2009. Contrairement à leurs deux albums de 2010, c'est ce disque qui fut le plus présent dans la setlist avec leur nouveau et excellent Wonderful, Glorious. Sur le même rythme très rock, le groupe enchaîne par Kinda Fuzzy. Le son est parfait, bien puissant et la voix de Mark Oliver Everett mixée en avant. Les versions live de tous les titres de la soirée sonnent plus puissamment que sur disque. En témoigne la version musclée de Tremendous Dynamite. Mark Oliver Everett est tout de suite dans son personnage décalé. Il laisse la guitare sur deux titres pour "danser" de façon improbable. Il lance le running gag de la soirée avec ces musiciens "Give me a hug". Dans la façon de le brailler et dans certains de ses déplacements, Ozzy n'est pas loin, avec 15 ans de moins. Chaque musicien viendra à un moment de la soirée le prendre dans ses bras avant la cérémonie de "mariage" avec un de ses guitaristes. Le batteur fait office de pasteur (alors que le leader du groupe est diacre) et le "Oui' des deux acteurs de l'union est plutôt convaincant. On aura droit aussi au "Group Hug" en rappel, subterfuge pour E. lui permettant de quitter la scène en lousdé. 

Après un début de concert sur les chapeaux de roue, on reconnaît immédiatement les premières notes de leur tube That Look You Give That Guy. Les jeunes devant moi reconnaissent la chanson de la B.O. des Petits Mouchoirs (sic...), d'autres sûrement le morceau repris à la Nouvelle Star. Mais E. n'est pas du genre à minauder. L'interprétation est superbe. Ses musiciens se chargent en chœur du "that look you give that guy....if I could be that guy..." avant que le frontman les rejoigne sur le dernier  refrain. Sûrement, la plus belle chanson d'amour de ces dernières années. Triste mais belle : "I lack the style and the pedigree and my chances are so few"..... Rapidement, dans la set list entre Peach Blossom et New Alphabet, versions bien débridées du nouvel album, arrive l'autre tube potentiel The Turnaround. La mélodie est magnifique et on attend tous l'irrésistible progression finale. Celle-ci se fait attendre et explose encore plus que l'on espérait : "Six bucks in my pockets, these shoes on my feet, the first step is out the door and into the streets". Avec ce nouvel album, les Eels sont toujours au top de leur carrière. Le morceau titre de celui-ci clôture la première partie du set après un Souljacker Part I très rock n' roll. Le groupe revient sur un morceau de l'édition limitée du nouvel album Brave Little Soldier avant un nouveau coup de maître pour les fans. The Eels commencent le premier couplet de My Beloved Monster du tout premier album Beautiful Freak  puis enchaine sur celui de Mr. E's Beautiful Blues avant de reprendre le refrain de premier titre et ainsi de suite. Comme Mark le hurle dans la sono, ils "mashup" ! "We did it! Like Jay Z! Ah ah!". La foule en redemande et le groupe revient sur le féroce Fresh Blood. Il est alors temps pour les nombreux spectateurs de regagner leurs voitures, vélos, bateaux. Si la musique des Eels est déjà très efficace sur disque, la rencontre live séduit plus encore.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Metallica/Gojira - Stade de France - Saint Denis - 12/05/2012

Miam Miam

Sebastiao Salgado - Genesis - Natural History Museum - London