Le Pont des Espions

Lincoln était le dernier film en date de Steven Spielberg à la réalisation. On l'avait trouvé vieux-jeu voire ringard. Daniel Day-Lewis avait comme toujours sauvé les meubles en terme d'incarnation mais les jeux de caméras n'impressionnaient vraiment pas. Dès les premiers plans du Pont des Espions, on ne joue pas dans la même cour. Le cadrage est bien plus dynamique, usant de gros plans. Le soin des détails est important pour réaliser la minutie des espions pour, en plein coeur de la Guerre Froide, recevoir et transmettre des informations. Ce New-York des années 50 est ultra réaliste. On retrouve aussi une mode vintage assez Mad Men. Spielberg est malin. Il garde un oeil sur ce que ces héritiers font de mieux. Le plan de l'avocat au perron de sa maison sous les flashs des journalistes est clairement Gone Girl. Le crash incontrôlé du pilote américain a des faux-airs de Gravity. Nullement ringard, Spielberg filme la Guerre Froide avec modernité. Tom Hanks est aussi un acteur qui ne risque jamais l'anachronisme. Il est toujours crédible. On ne l'avait pas vu dans un film de Spielberg depuis The Terminal en 2004. Et il faut bien avouer que les deux forment une paire irréprochable. Tom Hanks est Donovan, cet avocat en affaires d'assurance à qui son cabinet demande de défendre l'espion russe arrêté aux Etats-Unis. Il est l'homme debout. Abel le dit en russe. On pense à Giacommeti. Contre le cynisme du procureur et les remous de l'opinion publique, il s'appuie sur les fondations de la Constitution, croit dur comme fer aux vertus de la justice. Ce diplômé d'Harvard avait participé au procès de Nuremberg mais c'est grâce à cette histoire vraie que la carrière diplomatique de Donovan fut lancée. Elle le mena des Etats-Unis à Berlin au moment où l'Est contruit le mur. Une frontière où peut s'opérer un échange des espions. La R.D.A. cherche une légitimité et la température se réchauffe à nouveau entre les deux Grands. La reconstitution de Berlin est assez remarquable. Les images sont très pédagogiques même si l'on reconnaître un peu de parti pris dans les différences de traitement des prisonniers entre l'Est et l'Ouest. On ne nie pas non plus les vidéos de propagande américaine sur la peur d'une attaque nucléaire. Le rôle du jeune fils de Donovan connaissant parfaitement l'attitude à suivre en cas de bombardement est vraiment révélateur. Il fait écho à notre quotidien face à la menace terroriste. Le propos semble dur mais il ne faut pas oublier que Spielberg a confié aux frères Coen la réécriture du scénario. On rit beaucoup grâce à un comique de situation et très souvent des répliques implacables. Mark Rylance est parfait pour les distiller en clown triste communiste. Autour de Tom Hanks, les second rôles sont aussi très justes. On retrouve des acteurs habitués de rôles "d'Allemands", actuellement dans Homeland ou plus jeune, aperçu dans La Vague. Le Pont des Espions est une grande réussite.


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