Ibrahim Maalouf - Espace Malraux - Joué-lès-Tours - 28/01/2016

Le 14 décembre 2016, Ibrahim Maalouf célébrera ses 10 ans de Live à Bercy. Ce sera une première consécration pour un artiste omniprésent depuis quelques années sur la scène jazz et bien au delà. Le public de la Philarmonie l'a autant apprécié pour sa version revisitée d'Alice au Pays des Merveilles que pour son hommage à Oum Khaltoum. L'album Kalthoum (Alf Leila Wa Leila) est sorti à l'automne en même temps que Red & Black Light. Si le premier revisite dans une belle tradition jazz le répertoire de la diva égyptienne qui a bercé son enfance, le second est beaucoup plus fusion, voire carrément pop. Il est possible d'assister (dans les mesures des places disponibles qui s'arrachent) à des concerts de l'un ou l'autre de ses projets. Optons pour Kalthoum à l'Espace Malraux de Joué-lès-Tours. On y drôlement bien accueilli. Des avant-scènes ont lieu dans le hall d'entrée. Un plateau y est placé où jouent un pianiste et un contrebassiste, Valentin Pommeray et Simon Buffaud. Pendant ce temps, la salle se prépare puis les spectateurs peuvent enfin s'enfoncer dans leurs sièges dont le confort a été validé par Ibé pendant les balances ("et c'est pas le cas partout"). Quand le noir tombe, la musique ne commence pas tout de suite. Sur scène, Ibrahim Maalouf n'est pas que trompettiste. C'est aussi un sacré bon ambianceur utilisant les codes du stand up pour créer une complicité immédiate avec le public. Il s'amuse du fait que l'on ne connaisse pas bien Oum Kalthoum et essaie de transmettre un peu de pédagogie dans le rire.


Avant que ses musiciens ne le rejoignent, il invite sur scène Samir Homsi, joueur de oud syrien qui va interpréter superbement un morceau chanté de Khaltoum. Ibé s'amuse de son parcours de voyageur et vante les mérites de la transmission du savoir. Le contexte est posé. Les spectateurs sont détendus. Frank Woeste rejoint son piano (il a réarrangé les morceaux de l'album avec son vieux compère Ibrahim Maalouf), Scott Colley sa contrebasse, Clarence Penn sa batterie et Rick Margitza son saxophone. Jetez par curiosité un coup d’œil aux c.v. impressionnants de ces musiciens. Il a suffi d'une minute de réglage d'un saxo un peu fort pour que, pendant l'heure et demi qui suit, le son soit d'une perfection folle. Le disque est constitué de 7 pistes, une introduction, deux ouvertures et quatre mouvements. On connaît la setlist mais pourtant le groupe réussit à nous surprendre, à nous bluffer. Chacun sait faire un pas de côté pour laisser son voisin s'exprimer. Et quand, à la direction d'Ibrahim, l'ensemble repart de plus belle, l'harmonie est d'une telle perfection. Leur bonheur sur scène est beau à voir. Quelle générosité ! On nous avait dit qu'il fallait s'attendre à un concert plus calme que les sets habituels d'Ibrahim Maalouf mais la puissance dégagée par la musique de Khaltoum vaut bien la reprise de Led Zeppelin. Et on s'amuse toujours autant sur l'impro de trompette imitant une platine de dj, gestes à l'appui. Le public en redemande et, malins, les musiciens ont gardé un mouvement pour le "bis". Il est expliqué comme dans un sketch vocal que cette fin va être à rallonge pour faire durer le plaisir. Oum Khaltoum a toujours écrit de longs morceaux avec des refrains de 3-4 minutes. Mais, encore plus qu'à l'écoute du disque, ce concert nous cale dans le crâne des mélodies bien mémorables. Ibrahim nous raconte comment il a annoncé à sa famille libanaise qu'il allait faire un disque célébrant la carrière d'Oum Khaltoum. Ils ont retorqué : "pourquoi pas Fairuz?", grande star dans son pays d'origine. Du coup, il rappelle Samir pour interpréter à deux un titre de la chanteuse. Ibrahim est au chant et au riqq, tambourin ou "l'équivalent de la batterie pour les arabes". Depuis ses premiers albums solo, Diasporas et Diachronism, il voyage à travers les musiques. Un migrant dont il rappelle l'importance. L'ovation est toujours plus forte. Ibé ne veut pas quitter la scène et souhaite même voir le public dans une salle allumée. Il tient à nous faire siffler la mélodie de Lily (Is 2). Ces quelques notes écrites pour sa fille ouvrent l'album Diagnostic. Mais on se rend vite compte qu'un public de mélomanes n'est pas un public de musiciens. Il s'en amuse réussissant, avec humour à nous faire tenir la mélodie pendant qu'il improvise à la trompette, accompagné de Frank Woeste. Le concert se termina avec Ibrahim au piano. Et la standing ovation dura, dura, dura. 

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