Bestias

Fin juin, l'équipe des Quinconces Espal annonce que se retrouvent à l'affiche cette saison les créateurs de Mazùt (ici). Le message est diffusé très largement dans le cercle d'amis : il ne faut rater BESTIAS sous aucun prétexte. La compagnie Baro d'Evel a posé ses tentes Promenade Newton. Le génie est donc entré à nouveau au Mans début octobre 2017. C'est Blaï Mateu Trias (directeur, concepteur et interprète) qui nous reçoit en personne. Son fort accent catalan nous guide vers l'entrée avant de nous perdre dans un dédale où, y déambulant, nous croisons l'ombre d'un cheval au galop. L'art rupestre de Bonnefrite (Chunky Charcoal) renforce le sentiment initiatique de ce parcours. Nous voici plongé dans l'univers de Bestias. Le public est assis autour de la piste de cirque qui a deux entrées. Derrière nous se retrouve ce couloir circulaire que l'on avait pas totalement localisé, joyeusement perdu dans cette ambiance naissante. Les artistes jouent sur cette impression. Ils semblent égarés. Et c'est l'entrée en scène du cheval qui apporte toute l'humanité, la prestance qui fixe l'attention du spectateur. Bestias est écrit pour que les frontières entre animalité et humanité disparaissent. Les humains semblent plus maladroits que les animaux. Qui de l'oiseau ou de l'homme qui l'imite exprime mieux les émotions que l'on veut partager ? Les corps des hommes se dressent plus difficilement que celui du cheval. Et quand celui-ci a décidé de ne pas se lever, il pousse l'homme au burlesque. Cette dualité permet de créer des chorégraphies absolument phénoménales héritées du cirque et de l'art contemporain. On pense au travail de Ryan Heffington (Sia, The OA). Comme pour Mazùt, il y a des idées extraterrestres comme ce travail autour de la paille. Le ballet des cavaliers ornés d'un haut masque et la danse des "little bushes" sont absolument magiques. Le public (de 7 à 77 ans) est déjà en admiration devant tant d'imagination. Et les artistes ajoutent à leur virtuosité corporelle un sens aigu de la musique. Camille Decourtye est une chanteuse de grand talent. Sa maîtrise vocale est impressionnante passant de l'art lyrique à des mélodies qui ont la classe de PJ Harvey. Nicolas Lafourest (Chunky Charcoal également) est aussi à l'origine de la création musicale avec Camille, Blaï et Fanny Thollot. Ce dimanche après-midi d'octobre, nous avons vécu une convergence artistique bouleversante, drôle.. Tout ce que l'on recherche au quotidien réuni dans un spectacle. Ce dimanche après-midi, Bestias c'était notre cachette.